Manger bio, utiliser des produits naturels, consommer responsable… se lancer dans les produits safe, aller en direction du « green », fabriquer ses cosmétiques, refuser la société de consommation, manger végétarien, se cataloguer veggie, repousser les mangeurs de viande, oublier le made in China pour privilégier le français,… Tout cela est très à la mode. Aujourd’hui, on mange healthy, on prend soin de son corps et de la planète. On fait « beurk » face aux produits qui intègrent des cochonneries. Voilà… on devient « sains » (et certains profitent du phénomène).
Bien sûr, on va me dire que c’est plutôt cool de voir aller les gens dans ce sens et, très franchement, je trouve ça top… mais il y a quand même un truc qui me dérange dans tout ça.
C’est devenu carrément en vogue. A tel point que ceux qui ne suivent pas le mouvement sont un peu regardés comme des traitres. Mes propos sont sans doute exagérés, je sais… mais c’est juste pour tenter de vous faire passer l’idée et le sentiment qui me remplie le bide. Certains, parfois, en profitent pour faire la leçon à ceux qui ne rentrent pas dans le rang des gens « safe ». Et ça, franchement, j’aime pas… d’autant que je fais partie de ceux qui restent à l’écart du rang pour beaucoup de choses.
Je ne veux pas me la jouer rebelle, croyez-moi, mais, au fond, tout ça m’énerve assez.
Pour que vous compreniez bien, il faut que je vous parle de ma vie. Ouais, je sais, ce n’est pas le plus passionnant mais vous comprendrez mieux mon point de vue ensuite.
Quand j’étais petite, je vivais dans une ferme. Ce détail vous importe peu en réalité. Mon papa ne tirait pas le lait de ses vaches, nous ne le consommions pas. Il était éleveur de bovins et d’ovins. Nous avions donc des vaches et des moutons, élevés principalement pour leur viande. Pourtant, nous ne mangions pas de viande… ou vraiment hyper occasionnellement. On mangeait parfois du poulet. C’était alors jour de fête. D’ailleurs, je crois bien qu’on ne consommait de la viande que lors d’événements particuliers ou lorsque l’on invitait du monde à la maison.
La cause animale ? On en parlait déjà à la maison. Mais les médias n’en parlaient pas eux, à l’époque… C’était assez étrange comme situation : j’avais un père qui élevait des animaux pour leur viande et une mère complètement liée à la cause animale…
On était dans les années 80 et on était quasiment végétariens.
Franchement, ça ne me dérangeait pas. Pour moi, c’était normal. J’avais toujours mangé comme ça et je ne voyais pas le problème. Mais ça s’est corsé quand je suis entrée au collège. Là, ça a été vraiment différent. Je déjeunais désormais au « self » et je devais manger comme tout le monde. Déjà, le « monde », c’était pas trop mon truc. J’étais mal à l’aise avec les autres, j’étais hyper timide et réservé. Bref, le collège c’était vraiment l’horreur. J’avais un mal fou à m’intégrer et, en plus de ça, je ne mangeais pas comme tout le monde. Et pour moi, c’était vraiment dur à vivre ! Je me sentais trop différente alors que j’avais plutôt besoin d’être comme tout le monde. Vous savez, je ne voulais pas être celle qu’on remarque. Moi, je voulais me fondre dans la masse, m’y engluer, être AVEC les autres… et pas à côté du groupe…
Alors, je faisais un effort sur-humain pour tenter une intégration dans un groupe… et je faisais l’effort de manger « comme les autres ». Pas facile quand on ne sait pas comment manipuler un couteau et une fourchette dans l’exercice difficile de la découpe d’un morceau de viande… Je n’avais aucune idée du goût que pouvait avoir le boeuf, le veau ou je ne sais quelle autre viande autre que le poulet…
Bref, c’était pas facile du tout.
A côté de ça, je ne prenais jamais de médicaments.
Je ne me soignais pas comme les autres. A la maison, il y avait des marques de produits que personne ne connaissait. Aroma-Zone en faisait alors partie. A l’époque, c’était marginal et personne ne connaissait cette enseigne devenue, aujourd’hui, le temple des ingrédients cosmétiques naturels. On se soignait à coup d’huiles essentielles et de patience. Je ne connaissais pas les mots « Doliprane » ou « Ibuprophène »… Et je ne savais pas à quoi pouvait servir un antibiotique.
Alors, une fois adulte, en accédant à ce monde, j’ai eu comme le sentiment de m’intégrer (enfin).
C’est sans doute la raison pour laquelle, aujourd’hui, j’ai du mal à y retourner. Pourtant, au fond de moi, je sais bien que c’est mieux. J’ai d’ailleurs commencé à dégager bon nombre de produits néfastes de ma salle de bain… J’ai décidé de sortir de nos vies les perturbateurs endocriniens pour le bien des filles et pour nous aussi. Et puis, je suis allée jusqu’à acheter le nécessaire (sur Aroma-Zone bien sûr) pour fabriquer leur propre gel douche et shampoing. De cette façon, je suis sûre de ce qu’il y a dedans. Bref, vous voyez, je fais quand même des efforts.
Pourtant, je ressens un blocage.
L’histoire me perturbe. Je ressens tant d’engouement autour de cet univers, l’univers même dans lequel j’ai grandit et qui faisait de moi quelqu’un de différent… et ça me gêne ! C’est comme si grandissait en moi une sorte de colère. Promis, je ne le fais pas exprès. Mais il faut être honnête. Quelque part, j’en veux aux gens ! Je leur en veux de se lancer corps et âmes dans un truc simplement parce que ça fait bien… Bon sans doute aussi parce que c’est mieux… mais c’est plus facile de se lancer quand on se lance en masse…
Alors ouais, je leur en veux d’avoir été moquée parce que je vivais sainement, parce qu’il y avait « trop de poireaux » dans le potager de mes parents, parce que je ne prenais jamais de médicaments ou parce que je ne mangeais pas de viande. Toutes ces choses pour lesquels ils militent aujourd’hui… et qui m’ont isolée enfant. Mais, aujourd’hui, il y a quelque chose de branché à être végétarien… On aime le dire… moi, j’avais juste honte de le confesser…
Alors, voilà, c’est pour ça que j’ai tendance à bouder la tendance veggie…
Mon histoire ne m’excuse en rien… Ma soeur a eu la même histoire et, pourtant, elle a fait du végétarisme un mode de vie à part entière, allant même jusqu’à créer un blog entièrement consacré à la cuisine végétarienne… Nous n’avons pas pris les mêmes chemins. Moi, je suis un peu le vilain petit canard de la famille. J’en ai bien conscience. Mais aujourd’hui, tout cela ravive trop fortement mon passé de petite fille trop timide, trop isolée et trop discrète, qui aurait simplement voulu vivre « comme les autres »…
9 comments
Je suis végétarienne depuis plus de 10 ans, c’est clair que de voir cette façon de s’alimenter érigée en « tendance » ça me fait rire… Les industriels en profitent pour nous vendre des produits végé, alors qu’on arrivait à se nourrir sans avant !
L’avantage est quand même de pouvoir avoir de plus en plus de repas végé au restaurant, sans avoir besoin de demander une « faveur » au restaurateur, et ça j’apprécie !
Après ce qui compte pour moi ce sont mes valeurs, peu de médicaments, huiles essentielles, manger bio … je le fais pour moi, je ne le crie pas sur les toits outre mesure, et je ne me compare pas aux autres.
C’est pour moi l’essentiel, être en accord avec ce qu’on trouve bien pour soi, et peu importe qu’actuellement ça soit la mode ou non, je sais que je ne changerai pas même si la mode venait à passer.
La tendance associée à ce mode de vie m’énerve. C’est, finalement, une mode. Des gens se lancent dans le végétarisme sans se préoccuper de l’apport en protéines végétales et à l’équilibre alimentaire. Certaines s’imaginent bêtement qu’il suffit de manger des légumes et des fruits alors que c’est beaucoup plus compliqué que ça. Des carences peuvent en découler. mais c’est un autre sujet. C’est devenu trop « à la mode »… Il faut limite devenir végétarien « pour faire bien »… et je ne peux m’empêcher de détester ça.
Heureusement, comme tu le dis, ça a, au moins, l’avantage d’offrir + de diversité dans les resto… c’est un peu comme la mode du « sans gluten ». Finalement, ça permet aux vrais intolérants au gluten de voir un plus large panel de produits dans les rayons des magasins.
Je ressens exactement la même chose mais concernant la partie « vestimentaire ». Quand j’étais plus jeune, on avait pas forcément les moyens, on récupérait souvent les habits des grands frères/soeurs, on s’habillait avec des sous-marques, des marques de grande surface, du kiabi, c&a.. et qu’est-ce que j’ai pu être moquée pour ça au collège. C’est resté encré en moi avec l’idée que pour être cool, et normal il fallait porter de la marque. En arrivant sur Paris, cette impression s’est multiplié par 10…Et maintenant quand je vois que ces même sous-marques (kiabi, halle aux chaussures, lidl, tex etc..) sont mises en avant et rendue « cool » par certains blog, ça m’énerve. Pourtant ça devrait être top de se dire que maintenant on peut porter des vêtements à bas prix sans trop se faire remarquer mais je ne vois derrière ça qu’un effet de mode.
Alors que perso, ca devrait être bien de pouvoir trouver des vêtements sympas sans dépenser des fortunes.
Bref voilà mon ressenti.
C’est pour ca que je me dis parfois qu’il faudrait que je me méfie de ses tendances vestimentaires et veggie présentes à fond sur les réseaux sociaux et qui laissent penser que ce que font les autres est toujours mieux.
Il faut vivre comme on le veut ! (tjrs plus facile à dire qu’à faire)
Il n’y a pas de honte à ne pas etre véggie ou habillé avec des vêtements de sous-marque 😉
ça me renvoie encore au collège ton récit. Je me souviens que si t’avais pas d’Adidas ou de Nike, tes baskets, c’était de la merde ! Donc j’avais de la merde aux pieds. J’ai dû avoir mes premières Adidas à 27 ans 😀
Je comprends totalement ce que tu veux dire. Et ton texte, tout comme le mien, montre que notre passé influe sur nos ressentis au temps présent.
Merci pour ton commentaire.
J’ai tenté, j’ai aimé, et je me sentais mieux.
Mais je suis tombée enceinte et j’ai un bébé qui ne veut pas de veggie food donc j’ai du repartir sur l’alimentation « normale » sinon j’étais malade h24. Pourtant j’avais trouvé un equilibre même niveau poids on ressentait le changement.
J’ai eu qqn autour de moi qui m’a dit « moi enceinte ou pas enceinte c’est ca ou rien » .. mais perso je prefere manger autrement et ne pas être malade que me forcer et forcer mon bébé au final aussi à ingerer de la nourriture que l’on supporte plus et être malade à en crever… Après j’avoue j’avais essayé surtout parce qu’une amie avait essayé et apprécié sinon je n’aurais jamais franchis le cap.
Mais non, tu n’es pas le vilain petit canard de la famille. C’est juste un ressentis. Moi aussi, pour autre chose, je me sens le vilain petit canard de la famille mais je me résonne pour ne pas jouer les victimes. Tu le sais, j’ai « vomis » pendant très longtemps l’idée de l’alimentation saine, je l’ai eu en rejet pendant des années. Côté bouffe, oui, j’ai un intérêt pour la nutrition et une attirance pour la nourriture végétale (mais je ne suis pas végétarienne), ceci lié à l’éducation et non grâce/à cause des médias. Même si l’éducation conditionne énormément, tu es libre aujourd’hui de te nourrir comme tu le souhaites. Je suis comme toi, la mode m’agace. Les termes « healthy » « vegan » à tort et à travers me gavent et ne veulent rien dire au bout du compte. Nutritionnellement parlant, pour finir, je ne suis pas une convaincue du végétarisme. Il y a plusieurs écoles, des études scientifiques qui se contrarient, les idées qui divergent… Qui croire ? Il faut tout simplement faire ce que l’on croit être le mieux pour soi, et peu importe les modes !!! Mais c’est plus facile à dire qu’à faire librement, sans culpabilité. Surtout avec l’éducation que l’on a eu, entre nous 😉 Bisous !
Personnellement, je crois que je vais un peu te piquer quelques idées, moi qui suit adepte des choses industrielles et pas vraiment saines.
Bonjour, je découvre ton blog et ton article m’a interpelé. Bravo de souligner cet effet de mode, je suis d’accord. Mais j’ai toujours été intimement convaincue que le marketing et la grande distribution s’était pour une majorité d’entre nous mais que je devais, moi, faire la part des choses entre ce qui me plait, ce dont j’ai envie et ce qui me convient. Et cette même liberté, mon mari et mes enfants la pratique. Chacun a donc un peu son régime alimentaire et boude parfois ce qui est à ta table, refuse de manger du saumon, me réclame des pastabox ou je ne sais quoi. Mais à la longue, tous mangent des légumes et des fruits, tous sont en bonne santé et font de l’exercice. Je ne vais que très rarement dans les supermarchés et pourtant je suis contente parfois d’y trouver des choses plus naturelles, bio, etc à un prix raisonnable (la farine et la cassonade par exemple). Je privilégie la qualité, le local et le raisonné autant que possible. J’ai ce que j’appelle ma transition écologique (plus de produits d’entretien, je marche et je fais du vélo au lieu de prendre ma voiture, on mange mieux). Et surtout on « consomme » raisonnablement, en pensant à la planète, et on évite tout gâchis et surconsommation. Je ne cherche pas à aller vers un extrême, car de toute façon aucun courant ne m’a vraiment convaincue. Et je me sens bien par rapport à mes choix, j’en parle et je reste tolérante par rapport aux autres quoi qu’ils fassent, quoi qu’ils essaient. A vous lire bientôt, Carole
Très belle façon de voir oui. Mais aujourd’hui, malheureusement, beaucoup se lancent dans le végan ou autre « pour faire bien », pour être « à la page » sans réel soucis pour le reste. Mais heureusement il y a aussi des gens comme toi et c’est aussi vers tout cela que je veux tendre.
Au plaisir de te lire Carole